Le port de commerce gallo-romain des Mureaux (78)
Au cours des XIXe et XXe siècles, plusieurs fouilles ont révélé l’existence d’un important port antique sur les bords de Seine, aux Mureaux. Les premières constructions, situées au bout de la rue des Gros Murs, ont pu être datées des années 50 de notre ère. Les activités portuaires ont ensuite perduré jusqu’au milieu du IIe siècle. Les opérations archéologiques menées par le service archéologique des Yvelines, dans les années 80, ont permis d’étudier l’aménagement de quais de chargement et les différentes installations associées au port de commerce.
Une agglomération dès l’époque gauloise
Au début du IIe siècle avant notre ère, des populations gauloises (Carnutes) s’installent au nord de la Seine, côté Meulan, sur l’Île-Belle. Puis, une véritable agglomération s’étend jusqu’aux Mureaux.
Les traces archéologiques se résument à des bâtiments construits en bois et torchis et des objets qui montrent une importante activité artisanale (ex. le travail de l’os animal : alène et aiguille pour la pêche, dés à jouer, charnières…). La qualité de certains objets traduit également l’existence d’une élite aristocratique au sein de cette agglomération gauloise. Bien qu’aucun port n’ait été repéré pour cette période, le commerce à longue distance y était déjà développé comme en attestent les amphores d’origine greco-italique recueillies, importées dès le Ier siècle avant notre ère.
Des quais aménagés en terrasse à l’époque romaine
Plusieurs portions de quais de chargement, installés au milieu du Ier siècle, ont été fouillées sur plus de 50 m de long (une partie est encore visible le long du chemin de Halage). Construits sur des murs de 1 à 2 m de haut, les quais forment de larges terrasses surélevées qui consolident les berges du fleuve. Ces terrasses pouvaient servir au chargement/ déchargement et au stockage des marchandises transitant par le port. Les murs sont constitués d’un parement en bloc équarris de calcaire et de grès, comblé par des pierres liées à l’argile.
Les fragments de poterie retrouvés autour de ces blocs ont permis de dater la construction du milieu du Ier siècle.
La découverte de deux emplacements pour des poteaux en bois évoque les vestiges de pieux d’amarrage servant à l’accostage des bateaux.
Sur la terrasse, les vestiges d’un bâtiment et d’une cave ont également été identifiés ; ils pouvaient être utilisés comme lieux de stockage.
Au début du IIe siècle, on constate quelques derniers aménagements, notamment l’ajout d’une rampe dallée descendant vers le fleuve, à l’ouest du quai. Cependant, celle-ci est rapidement recouverte de débris divers (tuiles, blocs de mortier, gravats, pierres, etc.) qui évoquent la destruction et l’abandon finale du port. Parmi les débris, un sesterce d’Hadrien permet de situer ces évènements autour de la fin du IIe siècle.
L’existence d’un pont ?
Un pilier maçonné retrouvé en fouille, au bout de la rue des Gros Murs, et la présence de rangées de poteaux, observés au XVIIIe siècle dans la berge, pourraient signaler l’emplacement d’une base de pont ou d'un ponton.
L'axe de la rue actuelle était déjà utilisé à l'époque gallo-romaine, il est donc possible qu’un pont existe à son extrémité pour traverser la Seine. Cette rue se situe dans la continuité de l’importante voie commerciale nord-sud, reliant Beauvais à Orléans.
Des recherches, faites au XIXe siècle par M. Guégan de l’Isle, mentionnent la présence d’un chemin de halage longeant la Seine, en contrebas des terrasses, pour tracter les bateaux à l’aide de cordes. Cet espace est aujourd’hui en eau, il est donc difficile de confirmer son existence dès l’époque romaine.
Une activité économique diversifiée
Au-delà des structures portuaires, le mobilier archéologique retrouvé fournit des éléments d’information sur le type et l’origine des marchandises qui transitaient par le site. Bien que les denrées aient disparu (produits périssables), les contenants avec leurs formes spécifiques (amphores) nous renseignent sur ce qu’ils transportaient : huile, vin, préparations de poisson,… et sur leur origine (Italie, Espagne, sud de la France). De même, différents types de vaisselle (coupes, assiettes, cruches, pots) retrouvés sur le site sont issus d’un commerce d’assez longue distance.
Liée à ce port très actif, une ville gallo-romaine se développe dans l’axe de la rue des Gros Murs, favorisée par les échanges et le commerce florissant. Elle a laissé quelques traces archéologiques, comme des thermes, un bas-relief sculpté provenant probablement d’un bâtiment public et un ensemble de vaisselle en bronze, qui témoignent de sa richesse au moins jusqu’au IIe siècle.
Progressivement, les activités diminuent jusqu’à l’abandon des rives du fleuve au IIIe siècle. Il faudra attendre la période carolingienne (IXe siècle) pour que le port soit à nouveau réoccupé ponctuellement, ainsi que le secteur situé aujourd’hui sous le parc de l’Oseraie, avant d’être totalement abandonné au XIe siècle.
En dehors des quelques blocs conservés sur place, aucune trace de cette activité portuaire antique n'est visible aujourd'hui. A l'occasion d'une exposition rétrospective des recherches archéologiques qui s'est tenue à la médiathèque en 2015, "13 000 ans d'histoire aux Mureaux", une maquette du port a été réalisée et peut être empruntée à présent.