La dernière demeure d'habitants de l'âge du Bronze
Durant l’été 2015, une équipe du Service archéologique départemental des Yvelines a réalisé une fouille préventive sur d’anciens terrains agricoles, situés face au collège Jean-Baptiste de La Quintinye. Cette opération faisait suite à un diagnostic, conduit en 2014 par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), préalablement à la construction d'immeubles d’habitations.
La fouille, prescrite et contrôlée par l’État, a couvert une superficie de 1 200 m2. Elle a permis d’étudier les vestiges d’un petit cimetière daté de l’âge du Bronze, période très mal connue dans le département des Yvelines.
Un espace funéraire dédié à une partie de la population
Il se compose d’une dizaine de tombes, réparties au sein de deux ensembles, distants de 5 m seulement. Le tout occupe un espace restreint d’une centaine de mètres carrés.
Les onze tombes fouillées appartiennent à deux catégories morphologiques distinctes. Les premières (type A) sont de simples fosses oblongues de petite taille. Les secondes (type B) présentent des aménagements plus élaborés que l’on peut qualifier de coffrages. Ceux-ci sont réalisés à l’aide de blocs irréguliers de calcaire et de meulière. Certains blocs se situent en bordure de la fosse et d’autres, sont déposés sur la surface, en couverture.
La mise en place des tombes du type B a nécessité schématiquement cinq étapes, au minimum. Le creusement de la fosse sépulcrale est immédiatement suivi de l’installation de blocs, placés le long des parois. Le dépôt du corps n’intervient que dans un troisième temps. La sépulture fait alors l’objet d’un remblaiement rapide, avant sa fermeture définitive, à l’aide de pierres de différents modules.
Ces deux formes de sépulture, somme toute assez rudimentaires, ont été observées dans les deux noyaux, dans des proportions à peu près équivalentes.
Le traitement des défunts
Seule la pratique de l’inhumation individuelle est attestée à Noisy-le-Roi. Aucun fragment osseux ne montre de traces de crémation, y compris dans le cas des sépultures les plus altérées.
Lorsque cela a pu être démontré, les individus sont enveloppés dans un linceul. Ils sont préférentiellement placés sur le dos ou sur le côté, les bras et les jambes ramenés contre le corps. Les sujets sont orientés selon un axe nord-est/sud-ouest, la tête indifféremment au sud ou au nord.
Les objets déposés sont extrêmement rares et modestes. Seules deux tombes ont livré chacune un petit anneau filiforme en bronze.
Que sait-on de la population inhumée ?
Les données issues de l’analyse des squelettes mettent en avant la place prépondérante qu’occupent les jeunes individus au sein du groupe de sépultures. Les anthropologues dénombrent sept sujets dont la croissance n’est pas achevée. Il y aurait parmi eux cinq enfants et deux adolescents, auxquels il faut ajouter un sujet de taille adulte, susceptible d’avoir entre 15 et 19 ans. Pour les trois autres individus, l’âge n’a pu être déterminé en raison de l’état fragmentaire des ossements.
Leur état de santé n’est pas toujours évident à restituer à partir de squelettes incomplets et assez dégradés. En dehors de quelques dents cariées, il a été possible de repérer un cas de fracture du péroné. Cette fracture s’est proprement réduite du vivant de l’individu et laisse entendre que les soins essentiels ont été pratiqués.
Le témoignage d'une période mal connue...
Étant donné le peu de mobilier exhumé et la forme des inhumations fréquente durant plusieurs milliers d'années, la datation de ce cimetière pose des difficultés. Le recours à la datation du radiocarbone a donc été privilégié.
Pour cela, des mesures 14C (carbone 14) ont été réalisées sur des dents et des fragments osseux en bon état. Les six dates obtenues permettent de caler l'utilisation du cimetière entre le XVe et le XIIe siècle avant notre ère, période dénommée l'âge du Bronze.
Dans la région, cette période est précisément un moment charnière, marqué par l’abandon progressif de l’inhumation au profit de la crémation. Et pourtant, entre 1 500 et 1 150 avant J.-C., la communauté noiséenne continue à pratiquer l'inhumation de ses défunts.
Au même moment, à une quinzaine de kilomètres de là, à Saint-Germain-en-Laye, les corps sont incinérés sur des bûchers avant d’être ensevelis. De ce point de vue, le gisement de Noisy-le-Roi constitue un exemple sans équivalent en région parisienne !